Le dernier éclat - in memoriam Yvonne Quinzii
(Requiem)
texte de Max Loreau (« l'épreuve » ed Fata Morgana) et liturgie des défunts
Si cette oeuvre n'est pas une messe de requiem, elle s'en rapproche étroitement car l'architecture de la messe des morts a été envisagée et le déroulement de ses principales parties respecté.
Double hommage :
à Yvonne Quinzii (1940-2003), l'épouse, mais aussi la complice dans la création.
A propos de cette complicité, Guy Erismann a dit « en vingt ans, l'oeuvre commune d'Yvonne Quinzii et Gérard Garcin a été celle de deux personnalités très bien tranchées mais parfaits musiciens et gens de culture... »
à Max Loreau(1928 - 1990), le poète et l'ami avec qui la rencontre a abouti à plusieurs oeuvres dont notamment « Dans l'éclat du moment »
A propos de cette rencontre poète / musicien, Luc Morin écrivait dans la Libre Belgique « Et la musique du compositeur Gérard Garcin s'insinue dans ce ce qui est déjà rythme et musique chez Max Loreau, se coule entre les mots, les avive et les accompagne, avec l'audace de la musique contemporaine mêlées aux traditions du bel canto »
Il ne faut pas regarder le passé comme un monument historique mais pour le devenir qui est en lui, sinon on tombe dans la schizophrénie....
Cette pensée de Franco Donatoni a souvent servi de guide à Gérard Garcin.
Dans le cas présent, le passé est un terreau duquel doit émerger une pensée musicale. C'est pour cette raison que les textes liturgiques sont respectés dans leur fonction, et qu'une référence au chant grégorien existe.
Plusieurs parties empruntent les textes liturgiques de la messe des morts (rite romain) : chant d'entrée, graduel, trait, de profondis, lux aetérnae, in paradisum... Elles ont été pensées pour la maîtrise de Colmar(direction Arlette Steyer).
Pour autant, l'ensemble instrumental soutenant le texte n'est pas là uniquement pour accompagner la voix. De par sa composition, la nomenclature de l'ensemble permet des couleurs sonores différentes(Clavecin ou orgue positif/Théorbe ou luth).
Conçu pour être donné à entendre dans des lieux comme la grande nef des Dominicains de Haute Alsace à Guebwiller, la métropole Notre Dame des Dons à Avignon, ce requiem a suscité l'idée de spatialisation. Ce paramètre a été envisagé dès le début du projet. Les chanteurs comme le cornet à bouquin, la récitante seront les acteurs de cette spatialisation.
La motivation de cette spatialisation est en rapport direct au passé : magie de l'écho que les grands maîtres nous ont enseigné notamment à St Marc de Venise.
Le texte liturgique est utilisé avec rigueur, le chant grégorien trouve sa place, certes minime mais partie prenante de l'oeuvre, s'intégrant par glissement ou tuilage à un langage musical qui est celui de l'auteur : langage en décalage mais se voulant rigoureusement au service du texte.
Une exception est faite pour le Dies irae traité dans sa traduction française. Ce poème spécifique à la messe des morts a été au fil des temps une source d'inspiration des compositeurs y compris pour des oeuvres symphoniques. De par sa force dramatique, ce texte est exceptionnellement récité et envisagé dans une approche théâtrale.
« L'épreuve » de M. Loreau est la dernière oeuvre du poète, écrite peu de temps avant son décès. Dans la première partie de son oeuvre(Transfiguration : les propos qu'il tient), le poète raconte la maladie récente, force obscure, comme un naufrage...
« Soudain la maladie.
Sans s'annoncer, brutale aveuglement.
Comme la foudre qui frappe... »
Mais comme dans un rêve ou dans un au delà, apparaissent les sons, les mots :
« ...Des sons m'arrivent mais de très loin. Ils résonnent d'un vide innombrable...
C'est le temps qui cherche sa parole. Il prend des voies étranges. Il prononce des mots intrigants... »
Le rapport à la disparition brutale d'être cher a été pour moi immédiat.
Associé au grand orgue, le récit du texte est traité comme un chant même s'il s'agit de voix parlée, le soucis l'obsession du lyrisme est toujours là
Ainsi deux partitions, deux projets compositionnels viennent s'imbriquer, se confronter, au service d'un double hommage.
Extraits proposés :
Extrait 1
Extrait 2
Extrait 3
Enregistrement de la création publique: Maitrîse de garçons de Colmar - direction Arlette Steyer - Pierre Barra récitant.